Le témoignage de vie et de Foi du Père Simon Baron

Il est rare que les prêtres que nous côtoyons partagent leur expérience de vie. La vie paroissiale ne leur laisse d’ailleurs que peu de temps pour se dévoiler. Attentifs aux autres, ils accompagnent les fidèles avec leur propre parcours de vie. Le Père Simon Baron, prêtre diocésain, ordonné il y a 21 ans, choisit l’année de la Miséricorde et cette rentrée pastorale pour partager son expérience dans un livre-témoignage qu’il adresse à tous ceux qui souffrent et ne voient pas d’issue à leur détresse.

« Ce livre est le fruit d’un long travail personnel. En 1995, juste après mon ordination, j’avais écrit un petit feuillet de quelques pages à ma famille. Je savais au fond de moi, comme un appel intérieur, qu’un jour j’écrirais quelque chose de plus consistant, car je souhaitais témoigner de ma foi, de la présence de Dieu à mes côtés depuis mon enfance et malgré la dureté de celle-ci ». Le Père Simon Baron est le dernier de quatre enfants. De cette enfance, il dit pudiquement qu’elle a été marquée par une profonde violence affective et verbale. A son sens, des blessures physiques auraient été préférables : « elles auraient été circonscrites, visibles et soignables… J’aurais préféré être battu. J’étais le petit dernier et je pense que j’ai plus ressenti cette violence et le poids des non-dits. Mes parents m’ont donné la vie et pendant longtemps j’ai dit qu’ils m’avaient aussi donné la mort ». Ce témoignage est celui d’un enfant qui a souffert, et aussi celui d’un homme qui ose faire la vérité sur sa vie : « Ma foi a été déterminante dans mon parcours. Elle a toujours été claire et directrice. Il y a eu des rencontres mystérieuses qui m’ont fait basculer du bon côté… Et qui m’ont permis le pardon ».

«De la souffrance à l’amour» Père Simon Baron
Éditions «Le livre ouvert» en vente à la Procure, dans les librairies religieuses et à la FNAC .
Sortie septembre 2016.

Thérapie et accompagnement spirituel ont été la vie du Père Simon, avant et après son ordination. Et il l’affirme dans ce livre : on ne s’en sort pas seul ; cela demande un lent travail d’ouverture à l’autre : « Le pardon ne se donne pas sans souffrance et sans vérité ;  pour ma part, il m’aura fallu 30 ans ».

Pourquoi écrire tout cela ? « Pas pour parler de moi mais pour montrer qu’on peut sortir de la souffrance et se relever.  Comme le disait Saint Jean-Paul II ‘ Faire de sa vie un je t’aime ‘. » et il détaille : « L’année dernière, par hasard, j’ai rencontré un écrivain public qui m’a poussé à me lancer. J’avais déjà beaucoup de notes mais, le fait d’être épaulé par quelqu’un de neutre mais qui avait la foi, m’a permis de clarifier mes idées. Dans l’écriture, j’ai ressenti un vrai combat humain et spirituel. Cela m’a pris beaucoup de lundis de repos, sans que cela ne me paraisse lourd, le moment était venu. Je me suis senti porté par la présence de Marie. L’écrivain public habitait non loin de l’Ile Bouchard ».

En lisant un ouvrage du Pape François « Le nom de Dieu est miséricorde » dans lequel il est interviewé par un journaliste, le Père Simon a eu envie que son livre s’articule comme un dialogue, pour que les lecteurs se sentent directement mêlés à cet ouvrage. En réalisant que ce projet intervient durant l’Année de la Miséricorde, il y voit un signe : « Dieu attendait que je sois bien dans mes baskets pour que je puisse témoigner et que cela serve à d’autres.»

Simon Baron a toujours été touché par l’œuvre de Sœur Elvira : «El Cénacolo», qui accueille des jeunes toxicomanes et les remet debout… «Elle parle de «Christothérapie» et adjoint à chacun de ces jeunes, un ange-gardien qui veille sur lui jusqu’à se lever en pleine nuit pour accompagner une angoisse profonde. J’ai visité une communauté du Cénacle en Bosnie-Herzégovine. Je me dis que j’aurais pu, moi aussi frapper à sa porte. Je souhaite que ce livre serve à soulever les couvercles, à ouvrir des tombeaux !» Les droits d’auteurs de ce livre seront reversés intégralement à ces communautés du Cénacle.

Témoignage d’autant plus touchant qu’il engage un homme public : « Nous sommes des prêtres mais aussi des hommes, pas des extra-terrestres, nous sommes pétris de chair. Il est important qu’aujourd’hui, nous osions dire « je ». Je ne peux pas garder pour moi le trésor qui m’a tenu, car,  dans ce parcours chaotique une main invisible me guidait. Je suis convaincu que le ciel était présent dans cette enfance malheureuse.»

« Quand ce livre a été écrit, je l’ai remis à l’Église. Il ne m’appartient plus. J’en ai confié la lecture à Monseigneur Centène, ainsi qu’à mes frères et ma sœur. Ni les uns ni les autres n’y ont touché une seule virgule. C’est pour moi une joie de transmettre et de témoigner.

J’ai 50 ans et je suis au tournant de ma vie. J’ai le sentiment de prendre un virage de l’ordre du mystère pascal. Je prends une pince pour briser les chaînes des non-dits. Je sors d’une spirale de l’enfer et je veux en témoigner. Je dénonce l’amalgame de la haine, il faut faire attention aux enfants, aux gestes mais aussi aux paroles qui blessent profondément. Ce livre n’est pas un roman, il est écrit avec la plume de la foi.

Je parle aussi des moyens à se donner pour sortir de son tombeau. La thérapie est une aide précieuse, puisque mes blessures n’étaient pas physiques mais psychologiques et affectives. Être blessé par ceux qui nous ont donné la vie c’est pire que tout. Moi en tant que prêtre je suis amené à accueillir des personnes en souffrance spirituelle et psychologique et dans ce cas je n’hésite pas à passer le relais. Les guérisons sont souvent et spirituelles et psychologiques.

Le Saint Curé d’Ars invite à une juste articulation entre le ciel et la terre. Écrire, c’est se mouiller devant les confrères, devant l’Église, le monde. Mais moi, je le fais pour que ce livre tombe entre les mains d’un inconnu qui en a besoin.

J’ai souvent témoigné de mon parcours auprès de groupes scolaires, mais coucher tout cela sur le papier, prend une autre dimension. Tout au long de ma vie, dans ces ténèbres, j’ai eu la certitude de la présence de l’ami invisible. Et pourtant, comme Job, j’ai maudit le jour où je suis né.

En écrivant ce livre, je pense aux jeunes abîmés par la vie… Je pense aussi à la relève sacerdotale. Des jeunes d’aujourd’hui peuvent se dire « avec le parcours que j’ai, c’est pas pour moi » et pourtant ils peuvent se relever et révéler aux autres la tendresse de Dieu.

Le Pape François a des mots qui me touchent et me confortent dans la façon dont je relie mon parcours, car en moi je sens une joie qui n’est pas seulement humaine mais qui est de l’ordre de la joie de l’Évangile. Je m’attache depuis longtemps à avancer dans la simplicité, la proximité et la pauvreté. Pour ce qui me reste à vivre, j’aimerais témoigner de la beauté de la foi, qui me procure une incroyable force intérieure. »

Propos recueillis par I. Nagard – Journaliste – Service Communication du Diocèse de Vannes