Kerygma, replacer le coeur de la foi chrétienne dans tous les services pastoraux

Du 20 au 23 octobre 2023, des personnes de tous les services pastoraux des diocèses de France se sont retrouvées à Lourdes, missionnées par leur évêque, à l’initiative du Conseil pour la catéchèse et le catéchuménat de la CEF (Conférence des Évêques de France). L’objectif ? Mettre en lumière la nécessité de replacer le coeur de la foi chrétienne dans toutes les pastorales car toutes sont au service de la nouvelle évangélisation*.

Qu’est-ce que Kérygma ?

La démarche Kerygma a été lancée après la publication par le Vatican du 3ème Directoire pour la catéchèse en 2020, afin de répondre à l’invitation du pape François de mettre le kérygme** au centre de l’activité évangélisatrice et de tout objectif de renouveau ecclésial. (cf. La Joie de l’Evangile §164, Directoire pour la catéchèse § 58 ).

Décor évolutif du choeur de la basilique souterraine saint-Pie X

La démarche Kérygma se déroule en trois étapes :

Les objectifs

Stimuler et soutenir l’élan d’évangélisation en France, donner envie de témoigner de la présence du Christ dans sa vie, reconnaître, observer et partager les expériences locales d’évangélisation et les développer, ce sont les objectifs et ambitions de la démarche Kerygma, créée « davantage au service de la réflexion et du discernement dans la durée » que les belles initiatives missionnaires ponctuelles, telles que le Congrès Mission qui a eu lieu fin septembre (Voir notre article).

Qui est concerné ?

Dans chaque diocèse, les évêques ont été invités à appeler des personnes venant de diverses composantes de la vie ecclésiale pour travailler en amont et participer au rassemblement : évêques, prêtres, religieux, laïcs, membres de pastorales, de mouvements… En effet, l’annonce de l’Évangile rejoint nos contemporains par des portes multiples ! Plus de 2700 personnes étaient présentes, dont 250 prêtres et 45 évêques.

Que s’est-il passé à Lourdes?

Trois grandes conférences ont présenté la situation de l’Évangélisation en France, sont revenues aux fondamentaux du kérygme et ont envoyé les participants en « disciples-missionnaires ».
Les après-midi étaient consacrés à travailler concrètement sur l’annonce du kérygme, avec trois
tables rondes et 48 ateliers, qui ont permis d’aborder celui-ci dans toutes les pastorales. Une « pépinière » de « jeunes pousses » était proposée : un village des initiatives missionnaires des pastorales,  » humbles chemins pour rejoindre le monde.« 

Messe
Assemblée
Concert

Pour notre diocèse

Pour notre diocèse, le père Jean-Yves Le Saux est le référent Kerygma. Il a constitué une équipe de six personnes, des services de la diaconie & Mission Universelle, la Pastorale de la Réalité du Tourisme & des Loisirs (PRTL), le catéchuménat, la Pastorale catéchétique, accompagnées d’un représentant de l’équipe épiscopale. Cinq d’entre eux étaient présents à Lourdes.

De gauche à droite et de haut en bas : Père Yann Lamouroux, Sophie Renaud, Stéphanie Houeix, Père J.Y. Le Saux, Agnès Eon

« Notre petit groupe nous a permis d’avoir des échanges longs et approfondis », raconte Sophie Renaud, déléguée diocésaine à la pastorale catéchétique. « L’enjeu était de voir comment distiller sur le territoire diocésain le coeur de la foi. » « La société actuelle nous pousse à être pessimiste, mais les gens ont soif de sens, il y a une urgence de l’intériorité, d’un « Ephata du coeur » [ouverture du coeur à la guérison et à la vie spirituelle], comme le dit si bien le cardinal Bustillo dans son intervention. C’est ce qui donne des pistes pour annoncer le kérygme. »

Pour le père Jean-Yves Le Saux, « A Lourdes nous  étions peu nombreux du diocèse de Vannes, mais nous revenons de là-bas avec une  idée simple qui pourra être ensuite mise en oeuvre dans nos différentes réunions : les disciples missionnaires ne sont pas envoyés d’abord  pour organiser  de grands projets, mais pour  assurer la fécondité de l’Evangile.  L’important n’est pas de « faire », mais d’annoncer un événement qui offre un chemin de vie éternelle.« 

Habités par le Christ

« Pour moi, le sommet des ces trois jours a été l’intervention du cardinal François-Xavier Bustillo : il est parti d’une phrase avec trois mots : vivre en disciple missionnaire. Notre vie doit être un témoignage, en tant que disciples habités par le Christ, et pour annoncer le kérygme, pour que celui-ci soit reçu, il nous faut connaître les enjeux. Cela donne une bonne idée de la position que nous devons tenir. » Tenir la bonne position, c’est également «  regarder le monde chastement, c’est-à-dire sans vouloir le dominer.« 

Une image utilisée par le cardinal François-Xavier Bustillo pour décrire les différentes positions du disciple a été celle des bateaux : le pessimiste aura le bateau fantôme (dans le brouillard), le naïf aura un bateau de croisière (insouciant), le combattant, un bateau de guerre (pour se défendre et agir fermement), le discipliné aura un bateau cargo (sans passion, on fait les choses par devoir), et le collectif aura un ferry (il se transporte d’une situation à une autre avec d’autres personnes)… Le bateau n’est pas fait pour rester au port, même s’il y est en sécurité, s’il y a de la tempête, il doit traverser la mer en gardant le cap !

Sortir de l’encre et du papier

« Ces trois jours m’ont confortée dans ma façon d’aborder ma mission [à la Pastorale catéchétique – ndlr]« , continue Sophie Renaud. « Il faut des paroles audibles et des actes crédibles. La Parole n’est pas faite pour être juste proclamée, elle se vit. Comme l’a dit encore le cardinal Bustillo :  » on doit sortir de l’encre et du papier !« 

Chemin de croix
Atelier
Basilique éclairée de nuit

Ils ont dit…

Au cours d’échanges avec les diocèses de la Province Ecclésiastique présents, les évêques (Mgr Dognin, diocèse de Quimper et Léon, Mgr Moutel, diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, Mgr Bondu, évêque auxiliaire du diocèse de Rennes, et Mgr Percerou, diocèse de Nantes) ont redis ce qu’est vivre en disciple missionnaire :

  • être enracinés dans le Christ,
  • ne pas produire mais ÊTRE fécond,
  • avoir une vie spirituelle de prière personnelle mais aussi commune,
  • se former aux écritures,
  • faire une rencontre vivante avec le Christ, qui n’est pas une idée,
  • vivre en Église la diversité au coeur des diversités comme une richesse,
  • vivre les rassemblements dans la fraternité sous la conduite de l’Esprit-Saint,
  • ne pas rester dans la nostalgie du passé, ce qui est un obstacle à l’évangélisation,
  • etc…

Pour Sophie Renaud, « la graine de moutarde (semée avant nous ) commence à germer »…

Les chiffres


Pourquoi parle-t-on de *nouvelle évangélisation ?

L’évangélisation est en réalité toujours nouvelle ou alors elle n’évangélise pas ! La nouveauté de l’Évangile découle de sa nature de parole vivante qui s’adresse à toute personne, en tout lieu et à toute époque et de l’action de l’Esprit Saint qui renouvelle sans cesse l’action des disciples.

La nouvelle évangélisation est une expression énoncée par Saint Jean-Paul II lors de son premier voyage en Pologne en 1979.

« La nouvelle évangélisation doit impliquer que chaque baptisé soit protagoniste d’une façon nouvelle. Cette conviction se transforme en un appel adressé à chaque chrétien, pour que personne ne renonce à son engagement pour l’évangélisation, car s’il a vraiment fait l’expérience de l’amour de Dieu qui le sauve, il n’a pas besoin de beaucoup de temps de préparation pour aller l’annoncer, il ne peut pas attendre d’avoir reçu beaucoup de leçons ou de longues instructions. Tout chrétien est missionnaire dans la mesure où il a rencontré l’amour de Dieu en Jésus Christ ; nous ne disons plus que nous sommes « disciples » et « missionnaires », mais toujours que nous sommes « disciples missionnaires ».

La Joie de l’Evangile, §120

**Kérygme : Le mot kérygme vient du grec kerygma «proclamation à haute voix », dérivé de keryx, qui signifie « le messager », « le héraut qui annonce une victoire militaire par un bref message », voire un cri. Le kérygme est ainsi à la fois l’acte d’annoncer et le contenu de l’annonce. Pour les chrétiens le kérygme désigne l’annonce du coeur de la foi chrétienne, du mystère pascal, annonce à la fois d’une personne et d’un événement: Jésus Christ est mort et ressuscité pour nous !

Cette annonce, sous l’action de l’Esprit-Saint, vient toucher le coeur de celui qui l’entend et l’accueille et le « fait croire en Jésus Christ, qui par sa mort et sa résurrection nous révèle et nous communique l’infinie miséricorde du Père . (…) C’est l’annonce qui correspond à la soif d’infini présente dans chaque coeur humain. » (EG 164)

Le premier kérygme chrétien est prononcé par Pierre le jour de la Pentecôte « Il s’agit de Jésus le Nazaréen, […] Cet homme, livré selon le dessein bien arrêté et la prescience de Dieu, vous l’avez supprimé en le clouant sur le bois par la main des impies. Mais Dieu l’a ressuscité en le délivrant des douleurs de la mort, car il n’était pas possible qu’elle le retienne en son pouvoir. » (Livre des Actes des Apôtres, 2, 22-24).

Dans La Joie de l’Évangile, le pape François dit le kérygme sous une forme renouvelée : « Jésus-Christ t’aime, il a donné sa vie pour te sauver, et maintenant il est vivant à tes côtés chaque jour pour t’éclairer, pour te fortifier, pour te libérer » (La Joie de l’Evangile § 164). À sa suite, le travail des disciples-missionnaires d’aujourd’hui consiste à adopter un langage en actes et en paroles qui leur permettent de rejoindre leurs interlocuteurs.
Source : CEF